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Mobutu Sese Seko : grandeur, pouvoir et héritage d’un règne sans partage

Né le 14 octobre 1930 à Lisala, dans l’actuelle province de la Mongala (ex-Équateur), Joseph-Désiré Mobutu, plus tard connu sous le nom de Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga, demeure l’une des figures les plus marquantes — et controversées — de l’histoire politique congolaise.
Près de trois décennies après sa disparition, le souvenir de celui qui régna sur le pays de 1965 à 1997 continue de susciter débats et analyses, entre admiration pour le bâtisseur et critiques du despote.


Une jeunesse entre discipline militaire et curiosité journalistique

Orphelin de père dès son jeune âge, Mobutu est élevé dans un environnement catholique strict. Élève appliqué, il fréquente les écoles missionnaires avant d’intégrer la Force publique, l’armée coloniale belge, où il gravit les échelons jusqu’au grade de sergent-major, un rang rare pour un Congolais à l’époque.
Après son service militaire, il s’oriente vers le journalisme, collaborant notamment au journal Actualités africaines. Ce milieu lui ouvre les portes du débat politique à la veille de l’indépendance et lui permet de nouer des liens avec plusieurs leaders nationalistes, dont Patrice Lumumba.


De Lumumba au pouvoir

En 1960, à l’indépendance du Congo belge, Mobutu est nommé secrétaire d’État à la Défense dans le gouvernement de Lumumba. Mais le jeune État s’enlise rapidement dans des tensions politiques et ethniques.
Profitant du chaos institutionnel né du conflit entre Lumumba et le président Joseph Kasa-Vubu, Mobutu, alors chef d’état-major, orchestre en septembre 1960 un premier coup d’État militaire. Il neutralise les deux camps et prend le contrôle du pays « pour une période de neutralisation politique ».
Cinq ans plus tard, le 24 novembre 1965, il reprend le pouvoir par un second coup d’État, cette fois pour s’y installer durablement. Il devient président de la République et entame un règne de 32 ans, l’un des plus longs du continent africain.


Un pouvoir centralisé et un nationalisme affirmé

Dès les premières années de son régime, Mobutu met en place un pouvoir fort et centralisé. Il fonde le Mouvement Populaire de la Révolution (MPR), érigé en parti unique, et se proclame « président-fondateur » à vie.
Dans les années 1970, il lance la politique de recours à l’authenticité, un vaste programme idéologique visant à promouvoir la culture et l’identité africaine. Le pays devient le Zaïre, Léopoldville est rebaptisée Kinshasa, et les Congolais sont encouragés à abandonner leurs prénoms occidentaux au profit de noms africains.

Mobutu lui-même adopte le nom de Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga, que l’on traduit par : « le tout-puissant guerrier qui, par son endurance et sa volonté inflexible, ira de conquête en conquête en laissant le feu derrière lui ».
Cette politique, saluée à ses débuts, s’accompagne cependant d’une personnalisation extrême du pouvoir, d’une répression politique et d’une corruption institutionnalisée.


Entre stabilité et dérive économique

Le régime mobutiste a offert au Zaïre une certaine stabilité politique durant les premières années, évitant la désintégration du pays après les crises de l’indépendance. Mais cette stabilité s’est construite au prix d’un affaiblissement économique.
Malgré d’immenses ressources naturelles, l’économie zaïroise s’effondre progressivement, minée par la mauvaise gouvernance et le clientélisme. Mobutu est accusé d’avoir amassé une fortune colossale à l’étranger, tandis que la majorité de la population sombrait dans la pauvreté.

Dans les années 1990, face aux pressions internes et internationales, il accepte d’introduire le multipartisme. Toutefois, les promesses de transition démocratique s’enlisent dans des manœuvres politiques et des violences, plongeant le pays dans une crise prolongée.


La chute et l’exil

Affaibli par la maladie et isolé diplomatiquement, Mobutu voit son pouvoir vaciller à partir de 1996. La rébellion menée par Laurent-Désiré Kabila, soutenue par le Rwanda et l’Ouganda, progresse rapidement.
En mai 1997, Mobutu quitte le pays alors que les troupes de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération (AFDL) entrent à Kinshasa. Il trouve refuge au Maroc, où il décède le 7 septembre 1997, des suites d’un cancer de la prostate.


Héritage contrasté

L’héritage de Mobutu demeure l’un des plus complexes de l’histoire congolaise. D’un côté, il a su maintenir l’unité nationale et promouvoir une identité culturelle forte. De l’autre, son régime autoritaire et la corruption endémique qu’il a engendrée ont laissé un pays affaibli, économiquement exsangue et politiquement fragmenté.

Les guerres qui ont suivi sa chute, souvent qualifiées de « guerres du Congo », ont fait des millions de victimes et révélé les fractures profondes laissées par trois décennies de mobutisme.


Un devoir de mémoire

Se souvenir de Mobutu Sese Seko, c’est revisiter une page essentielle de l’histoire du Congo. C’est aussi interroger les liens entre pouvoir, leadership et responsabilité.
Le devoir de mémoire consiste non seulement à rappeler les faits, mais aussi à tirer les leçons d’un passé complexe, afin de construire un avenir plus démocratique, équitable et durable pour la République démocratique du Congo.

La rédaction

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